Big Brother is watching me

Jour 20 – Mercredi 5 mars 2025.

J’aurai pu l’appeler Dark Vador pour son côté obscur, mais j’ai opté pour Big Brother en référence à 1984 de George Orwell.

Je parle de mon juge intérieur, celui qui surveille le moindre de mes faits et gestes et trouve toujours à redire. Il a cette manière très insidieuse de venir doucher mes élans, de rappeler sans cesse les limites : celles qu’il m’impose, celles qu’il me reproche d’avoir.

A l’image du harceleur qui vient hanter sa victime même lorsqu’il n’est pas physiquement là, j’ai tellement intériorisé ce juge – Big Brother – qu’il fait planer sur moi une menace permanente. Ce qui m’a souvent amenée à censurer mes pensées et torpiller mes projets avant même d’avoir pu les énoncer. Ce qui a généralement pour conséquence de lui donner raison. Le plan perdant-perdant, en somme.

Il tient souvent des discours désobligeants, voire insultants. Ces discours, je ne les accepterai pas d’une autre personne. Pourtant ils font régulièrement irruption dans mon espace mental. Parfois même, je les formule à voix haute.

Lorsque j’échappe un « Quelle buse ! », j’arrive à me trouver injuste envers ces rapaces qui sont loin d’être bêtes, mais pas envers moi. « Conne, empotée, pas douée, complètement stupide » reviennent encore spontanément malgré ma vigilance.

Car oui, maintenant je surveille Big Brother pour l’envoyer promener le plus vite et loin possible. Et j’avoue, avec lui je suis violente. Disons qu’il me donne l’occasion de jouer mentalement au tennis, et la balle, c’est lui.

Ma foi, cette technique marche plutôt bien. Elle me soulage et il prend son temps avant de revenir.

Au début je n’arrivais pas à percevoir ses petites phrases jugeantes. Je repérais qu’elles étaient passées à la honte ou la culpabilité que je ressentais. J’ai donc commencé à jouer au tennis avec ces sentiments désagréables. Ce qui revient à casser le thermomètre lorsque l’on a de la fièvre.

Et puis j’ai appris à différencier ces deux petites voix désagréables. Je leur ai donné un nom, Jiminy et Big Brother. Je leur ai donné aussi un caractère pour faciliter leur repérage… et nos dialogues. Depuis, que je sais comment les traiter, notre vocabulaire s’apaise.

Et mon climat social intérieur aussi !